Buste de Nelligan adolescent par Roseline Granet (2005). Carré Saint-Louis. Montréal

Poésies (Sélection 2)

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« […] Émile Nelligan fut un poète prodigieusement doué, à qui il n’a manqué que le temps et le travail pour devenir un grand poète. Tel qu’il est, il aura merveilleusement reflété tout un coin du ciel de la poésie, et conquis une place bien à lui dans notre anthologie canadienne. Il s’est dépeint lui-même tout entier, avec ses dons superbes, avec ses impuissances fatales, avec la catastrophe enfin qui l’a brisé en plein essor, dans ces vers qui pourraient être son épitaphe :

Je sens voler en moi les oiseaux du génie,
Mais j’ai tendu si mal mon piège qu’ils ont pris
Dans l’azur cérébral leurs vols blancs, bruns et gris,
Et que mon coeur brisé râle son agonie. »

(Louis Dantin, Montréal, août 1902)


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3 Commentaires

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  1. Je trouve cela grave de nier la démence en la réduisant à “un inadapté, un être trop lucide pour se sentir à l’aise et blablabla…” Encore un qui projette ses propres déceptions sur le génie des fous.
    ET qui n’a rien compris au lien particulier qui existe entre l’art et la folie… Peut-être la folie entraîne t’elle une vie spirituelle si intense qu’elle crée de grands artistes? Mais en tous les cas elle entraîne une souffrance telle qu’on ne peut la réduire à des problèmes d’inadaptation sociale, même si on s’appelle François Hertel.

    En tous les cas merci pour cette lecture.

  2. Le temps il l’a eu amplement. Là n’était pas la question, en effet. C’était écrit dans le ciel, Nelligan n’exista que pour la création poétique à l’état pur et rien d’autre. Il était loin d’être fait pour le monde littéraire, surtout de son temps, son époque, son pays. D’ailleurs François Hertel a écris une chose assez remarquable à son sujet, qui, je pense, mérite d’être mentionnée ici :

    «Je ne suis pas sûr qu’Émile Nelligan, le prince des poètes, fût vraiment un dément. Il fut selon moi un inadapté, il fut trop pur et trop lucide pour se sentir à l’aise dans un monde ‘vagissant’ où il n’avait pas sa place.»

  3. Je ne partage en rien l’avis de Louis Dantin : “il ne lui manqué que le temps et le travail pour devenir un grand poète”.
    N’importe quel lecteur de “La Romance du vin” constate que Emile Nelligan, malgré son jeune âge, était en pleine possession de son art.
    Bien d’autres poèmes de cet auteur sonnent d’ailleurs magnifiquement à nos oreilles.
    Le vers célèbre de Corneille : “La valeur n’attend point le nombre des années” n’a pas, semble-t-il, retenu l’attention de Monsieur Louis Dantin.
    En fait de précocité, Rimbaud par exemple bat tous les records, mais il ne viendrait à l’idée de personne de déprécier “Le bateau ivre” sous prétexte qu’il fut écrit à l’âge de dix-sept ans.
    Dans sa courte vie littéraire, Emile Nelligan a donné le meilleur de lui-même : son génie et des chefs-d’oeuvre !

    Merci pour vos belles interprétations.

    Thierry

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