Buste de Platon. Marbre, copie romaine d'un original grec du dernier quart du IVe siècle av. JC

Lachès

« Eh bien! Nicias et Lachès, vous avez vu cet homme qui vient de combattre tout armé. Nous ne vous avons pas dit d’abord pourquoi Mélésias et moi, nous vous engagions à venir assister avec nous à ce spectacle ; mais nous allons vous l’apprendre, persuadés que nous pouvons vous parler avec une entière confiance. Bien des gens se moquent de ces sortes d’exercices, et quand on leur demande conseil, au lieu de dire leur pensée, ils ne cherchent qu’à deviner le goût de ceux qui les consultent, et parlent contre leur propre sentiment. Pour vous, nous sommes persuadés que vous joignez la sincérité aux lumières ; c’est pourquoi nous avons pris le parti de vous consulter sur ce que nous allons vous communiquer. Après ce préambule, j’arrive au fait. Voici nos enfants, celui là, fils de Mélésias, porte le nom de son aïeul, et s’appelle Thucydide ; et celui-ci, qui est à moi, porte aussi le nom de mon père, et s’appelle comme lui Aristide. Nous avons résolu de prendre le plus grand soin de leur éducation, et de ne pas faire comme la plupart des pères, qui, dès que leurs enfants sont devenus un peu grands, les laissent vivre à leur fantaisie. Nous croyons au contraire que c’est le moment de redoubler de vigilance auprès d’eux ; et comme vous avez aussi des enfants, nous avons pensé que vous auriez déjà songé aux moyens les plus propres à les perfectionner ; et si vous n’y avez pas encore réfléchi sérieusement, nous voulons vous faire souvenir que c’est une affaire à ne pas négliger, et vous inviter à délibérer en commun sur l’éducation que nous devons donner à nos enfants. Quand même je devrais m’étendre un peu trop, il faut que vous m’entendiez, et que vous sachiez, Nicias et Lachès, ce qui nous a portés à prendre ce parti. Mélésias et moi nous n’avons qu’une même table, et ces enfants mangent avec nous ; mais je vais continuer à vous parler sans réserve, comme je vous l’ai dit au commencement. Nous avons, il est vrai, lui et moi, à entretenir nos enfants de mille actions honorables que nos pères ont faites, soit dans la paix, soit dans la guerre, tandis qu’ils administraient les affaires de la république et celles de nos alliés ; mais nous ne pouvons tous deux leur dire rien de semblable de nous, ce qui nous fait rougir devant eux et accuser la négligence de nos pères, qui, aussitôt que nous avons été un peu grands, nous ont laissé vivre au gré de nos caprices, pendant qu’ils donnaient tous leurs soins aux affaires des autres. C’est au moins un exemple que nous montrons à ces enfants, en leur disant que s’ils se négligent eux-mêmes, et s’ils ne veulent pas suivre nos conseils, ils vivront comme nous, sans gloire ; au lieu que s’ils veulent travailler, ils se montreront peut-être dignes du nom qu’ils portent. Ils promettent d’obéir, et, de notre coté, nous cherchons les études et les exercices auxquels ils doivent se livrer, pour devenir des hommes distingués. Quelqu’un nous a parlé de cet exercice, disant qu’il était bien à un jeune homme d’apprendre à combattre tout armé. »

Traduction : Victor Cousin (1792-1867).

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Livre audio gratuit ajouté le 12/09/2013.

7 Commentaires

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  1. bonsoir Ahmed

    merci pour l’intérêt porté pour ma lecture de Platon
    mais pour l’instant je me consacre à d’autres lectures

    amicalement
    Francis

  2. Bonjour Francis

    Encore une réponse qui me rassure et continuer à écouter pleinement La Philosophie …
    Mr René , merci à vous aussi .

    Un agréable Week-end à vous tous.

    Amitiés
    Ahmed

  3. bonjour Ahmed et René

    je vous remercie Ahmed de l’intérêt que vous portez
    à mes lectures et essaierai de vous satisfaire
    Merci René pour cette précision

  4. Bonsoir Francis ,

    Merci infiniment et souhaiterais vous écouter sur d autres dialogues .Désolé mon insistance

    Amitiés

    Ahmed

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