Nul doute que Wilkie Collins n’ait donné avec Sans nom l’un de ses plus intraitables chefs-d’œuvre : celui en tout cas qui privera le mieux de sommeil le lecteur assez téméraire pour s’y plonger, pour s’y perdre. De tous ses romans, celui que préférait Dickens… C’est aussi le plus noir : portrait et itinéraire d’une femme dépossédée de toutes ses espérances (et même de son identité) à la suite d’un complot fomenté par des gens du meilleur monde. Elle se battra, se salira les mains, fera le terrible apprentissage de la liberté… et nous tiendra en haleine huit cents pages durant au fil d’une intrigue qui ne nous épargne rien. Prétexte, pour l’auteur, à décorseter la bonne société victorienne avec un sadisme tout hitchcockien.
Extrait :
« Existe-t-il donc, dans tout être humain, au-dessous de ce caractère extérieur et visible, empreint et façonné par les influences sociales qui nous entourent, une disposition intérieure, invisible, qui fait partie intégrante de nous-mêmes, que l’éducation peut modifier indirectement, mais qu’il faut désespérer de changer ? La philosophie qui conteste ceci et nous déclare nés avec des dispositions semblables à des feuillets de papier blanc, n’est-elle pas la même qui méconnaît la différence irrémédiable de nos visages, et qui, n’ayant jamais comparé deux enfants nouveau-nés, ignore à quel point échappent déjà, par d’irrésistibles instincts, à la volonté de leurs mères ou de leurs nourrices ? Existe-t-il, variant à l’infini selon chaque individu, des forces innées qui nous poussent, tous tant que nous sommes, vers le Bien ou vers le Mal ? forces cachées à des profondeurs où ne sauraient atteindre ni les encouragements purement humains, ni la contrainte humaine, Bien caché, Mal caché, tous deux également à la merci de l’occasion qui les libère, de la tentation qui les provoque ? De leur étroit cachot, le hasard des circonstances garde-t-il toujours la clef ? Et n’est-il pas ici bas de surveillance attentive qui nous puisse révéler à temps l’existence de ces forces prisonnières en nous-mêmes, et auxquelles cette clef peut donner issue ? »
Oui, le titre en dit long! Et bien au plaisir cher Daniel, nous n’y manquerons pas. A bientôt donc et encore merci pour tout ce que vous nous faites bien généreusement découvrir.
Personnellement je suis preneuse !
Vous me rappelez, chère veronique, que cela fait un moment que je n’ai pas “fait” de Wilkie Collins. Tiens, “L’Hôtel hanté”, peut-être…
A bientôt ?
Ah quel roman et quelle lecture!
Tout est à l’unisson du peur régal! J’ai passé un délicieux et long moment à vous écouter cher Daniel, mais pas si long finalement, tellement j’ai été prise par la passion de l’histoire. J’ai hâte de continuer avec Wilkie Collins . Grand merci cher Daniel!!!
Je vous en prie, MarieB, même si je ne me sens pas aller au “travail” lorsque je m’y mets !