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PROPERCE – Élégies
Traduction : Jules-Charlemagne Genouille (1834).
Livre I, Élégie 2 : À Cynthie
Pourquoi, mon âme, pourquoi cette chevelure élégante ? Pourquoi la soie frôle-t-elle en mille plis moelleux ? Pourquoi ces parfums de l’Orient que tu répands sur ta tête ? Pourquoi te rendre esclave des produits étrangers, ensevelir sous un éclat emprunté les charmes de la nature, et ne pas laisser ton corps briller de ses propres richesses ? Crois-moi, Cynthie, il n’est point de fard qui convienne à tes traits. L’Amour est nu ; il chérit la beauté pour elle-même, et dédaigne de vains artifices.
Vois les couleurs dont se parent les riantes prairies ; vois le lierre se déployer lui seul avec plus d’énergie, l’arboisier s’élever plus florissant sur la roche solitaire, et le ruisseau se frayer une route vagabonde. Nos rivages sont naturellement émaillés de mille cailloux, et l’art n’imitera jamais la douce harmonie des oiseaux.
Ce n’est point par la parure que Phébé, la fille de Leucippe, enflamma Castor, que sa soeur Élaïre charma Pollux, que la fille d’Évènus plut jadis, sur les rives de son père, à Idas et à Phébus, qui se disputèrent sa conquête. Hippodamie n’avait point séduit le Phrygien Pélops par des couleurs empruntées, lorsqu’un char ravisseur la transporta sur des rivages lointains. La beauté ne se cachait point encore sous les pierreries ; mais elle se contentait de briller du coloris d’Apelle : car alors on ne cherchait pas sans cesse de nouveaux amants ; et les femmes étaient assez belles, ornées de leur seule pudeur.
Je ne crains plus aujourd’hui que tu m’accordes un sentiment moins tendre : mais on a assez d’attraits quand on plaît à celui qu’on aime. Toi surtout, à qui Phébus accorde le don des vers et à qui Calliope prête volontiers sa lyre ; toi, dont les moindres discours ont un charme secret ; toi, qui réunis aux talents de Minerve les grâces de Vénus, oui, tant que je vivrai, tu me seras chère : mais désormais dédaigne un luxe inutile.