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#152038
FFrançois B.
Participant

    SAINT JEAN DE LA CROIX – La Nuit obscure

    Traduction par le Père Cyprien de la Nativité (1605-1680).

    CANTIQUES DE L'ÂME, OÙ ELLE CHANTE L'HEUREUSE AVENTURE QU'ELLE A EU À PASSER PAR L'OBSCURE NUIT DE LA FOI, EN NUDITÉ ET PURGATION À L'UNION DE SON BIEN-AIMÉ

    À l'ombre d'une obscure Nuit,
    D'angoisseux amour embrasée,
    Ô l'heureux sort qui me conduit,
    Je sortis sans être avisée,
    Le calme tenant à propos
    Ma maison en un doux repos.

    À l'obscur, mais hors de danger,
    Par une échelle fort secrète,
    Couverte d'un voile étranger
    Je me dérobai en cachette,
    (Heureux sort !) quand tout à propos
    Ma maison était en repos.

    En secret sous le manteau noir
    De la Nuit, sans être aperçue,
    Où que je pusse apercevoir
    Aucun des objets de la vue,
    N'ayant ni guide, ni lueur,
    Que la lampe ardente en mon cœur.

    Ce flambeau luisant me guidait,
    Plus sûr que la torche allumée
    Du plein midi, où m'attendait
    Celui que j'avais en pensée,
    Là où nul vivant sous les Cieux
    Ne se présentait à mes yeux.

    Ô Nuit qui me conduis à point !
    Nuit plus aimable que l'aurore !
    Nuit heureuse qui as conjoint
    L'Aimée à l'aimé, mais encore
    Celle que l'amour a formé,
    Et en son Amant transformé.

    Dans mon sein parsemé de fleurs,
    Qu'entier soigneuse je lui garde,
    Il s'endort, et pour ces faveurs,
    D'un chaste accueil je le mignarde,
    Lors que l'éventail ondoyant
    D'un Cèdre le va festoyant.

    L'Aurore par ses doux Zéphirs,
    Ayant épars sa chevelure,
    Mit sa main pleine de saphirs
    Sur mon col flattant ma blessure,
    Lors sa douceur tint en suspens
    L'entier usage de mes sens.

    Je me tins coi, et m'oubliai,
    Penchant sur mon ami ma face,
    Tout cessa, je m'abandonnai,
    Remettant mes soins à sa grâce :
    Comme étant tout enseveli
    Dans le beau parterre des Lis.

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