ARVERS, Félix – Poésies

Accueil Forums Textes ARVERS, Félix – Poésies

3 sujets de 1 à 3 (sur un total de 3)
  • Auteur
    Messages
  • #145820
    Prof. TournesolProf. Tournesol
    Participant

      ARVERS, Félix – Mes heures perdues


      À mon ami

      Tu sais l’amour et son ivresse
      Tu sais l’amour et ses combats ;
      Tu sais une voix qui t’adresse
      Ces mots d’ineffable tendresse
      Qui ne se disent que tout bas.

      Sur un beau sein, ta bouche errante
      Enfin a pu se reposer,
      Et sur une lèvre mourante
      Sentir la douceur enivrante
      Que recèle un premier baiser…

      Maître de ces biens qu’on envie
      Ton cœur est pur, tes jours sont pleins !
      Esclave à tes vœux asservie,
      La fortune embellit ta vie
      Tu sais qu’on t’aime, et tu te plains !

      Et tu te plains ! et t’exagères
      Ces vagues ennuis d’un moment,
      Ces chagrins, ces douleurs légères,
      Et ces peines si passagères
      Qu’on ne peut souffrir qu’en aimant !

      Et tu pleures ! et tu regrettes
      Cet épanchement amoureux !
      Pourquoi ces maux que tu t’apprêtes ?
      Garde ces plaintes indiscrètes
      Et ces pleurs pour les malheureux !

      Pour moi, de qui l’âme flétrie
      N’a jamais reçu de serment,
      Comme un exilé sans patrie,
      Pour moi, qu’une voix attendrie
      N’a jamais nommé doucement,

      Personne qui daigne m’entendre,
      A mon sort qui saigne s’unir,
      Et m’interroge d’un air tendre,
      Pourquoi je me suis fait attendre
      Un jour tout entier sans venir.

      Personne qui me recommande
      De ne rester que peu d’instants
      Hors du logis ; qui me gourmande
      Lorsque je rentre et me demande
      Où je suis allé si longtemps.

      Jamais d’haleine caressante
      Qui, la nuit, vienne m’embaumer ;
      Personne dont la main pressante
      Cherche la mienne, et dont je sente
      Sur mon cœur les bras se fermer !

      Une fois pourtant – quatre années
      Auraient-elles donc effacé
      Ce que ces heures fortunées
      D’illusions environnées
      Au fond de mon âme ont laissé ?

      Oh ! c’est qu’elle était si jolie !
      Soit qu’elle ouvrit ses yeux si grands,
      Soit que sa paupière affaiblie
      Comme un voile qui se déplie
      Éteignit ses regards mourants !

      – J’osai concevoir l’espérance
      Que les destins moins ennemis,
      Prenant pitié de ma souffrance,
      Viendraient me donner l’assurance
      D’un bonheur qu’ils auraient permis :

      L’heure que j’avais attendue,
      Le bonheur que j’avais rêvé
      A fui de mon âme éperdue,
      Comme une note suspendue,
      Comme un sourire inachevé !

      Elle ne s’est point souvenue
      Du monde qui ne la vit pas ;
      Rien n’a signalé sa venue,
      Elle est passée, humble, inconnue,
      Sans laisser trace de ses pas.

      Depuis lors, triste et monotone,
      Chaque jour commence et finit :
      Rien ne m’émeut, rien ne m’étonne,
      Comme un dernier rayon d’automne
      J’aperçois mon front qui jaunit.

      Et loin de tous, quand le mystère
      De l’avenir s’est refermé,
      Je fuis, exilé volontaire !
      – Il n’est qu’un bonheur sur la terre,
      Celui d’aimer et d’être aimé.

      #142090
      Prof. TournesolProf. Tournesol
      Participant
        #145821
        Prof. TournesolProf. Tournesol
        Participant

          Sonnet

          Mon âme a son secret, ma vie a son mystère,
          Un amour éternel en un moment conçu :
          Le mal est sans espoir, aussi j’ai dû le taire,
          Et celle qui l’a fait n’en a jamais rien su.

          Hélas ! j’aurai passé près d’elle inaperçu,
          Toujours à ses côtés, et pourtant solitaire.
          Et j’aurai jusqu’au bout fait mon temps sur la terre,
          N’osant rien demander et n’ayant rien reçu.

          Pour elle, quoique Dieu l’ait faite douce et tendre,
          Elle ira son chemin, distraite et sans entendre
          Ce murmure d’amour élevé sur ses pas.

          À l’austère devoir pieusement fidèle,
          Elle dira, lisant ces vers tout remplis d’elle
          « Quelle est donc cette femme ? » et ne comprendra pas.

        3 sujets de 1 à 3 (sur un total de 3)
        • Vous devez être connecté pour répondre à ce sujet.
        Veuillez vous identifier en cliquant ici pour participer à la discution.
        ×