NERVAL, Gérard (de) – Poésies

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  • #146194
    VictoriaVictoria
    Participant

      NERVAL, Gérard (de) – Poésies

      El Desdichado


      Je suis le Ténébreux, – le Veuf, – l’Inconsolé,
      Le Prince d’Aquitaine à la Tour abolie :
      Ma seule Étoile est morte, – et mon luth constellé
      Porte le Soleil noir de la Mélancolie.

      Dans la nuit du Tombeau, Toi qui m’as consolé,
      Rends-moi le Pausilippe et la mer d’Italie,
      La fleur qui plaisait tant à mon coeur désolé,
      Et la treille où le Pampre à la Rose s’allie.

      Suis-je Amour ou Phoebus ?… Lusignan ou Biron ?
      Mon front est rouge encor du baiser de la Reine ;
      J’ai rêvé dans la Grotte où nage la Sirène…

      Et j’ai deux fois vainqueur traversé l’Achéron :
      Modulant tour à tour sur la lyre d’Orphée
      Les soupirs de la Sainte et les cris de la Fée.

      #146195
      VictoriaVictoria
      Participant

        Mélodie

        (Imitée de Thomas Moore)

        Quand le plaisir brille en tes yeux
        Pleins de douceur et d’espérance,
        Quand le charme de l’existence
        Embellit tes traits gracieux, -

        Bien souvent alors je soupire
        En songeant que l’amer chagrin,
        Aujourd’hui loin de toi, peut t’atteindre demain,
        Et de ta bouche aimable effacer le sourire ;
        Car le Temps, tu le sais, entraîne sur ses pas
        Les illusions dissipées,
        Et les yeux refroidis, et les amis ingrats,
        Et les espérances trompées !

        Mais crois-moi, mon amour ! tous ces charmes naissants
        Que je contemple avec ivresse,
        S’ils s’évanouissaient sous mes bras caressants,
        Tu conserverais ma tendresse !
        Si tes attraits étaient flétris,
        Si tu perdais ton doux sourire,
        La grâce de tes traits chéris
        Et tout ce qu’en toi l’on admire,
        Va, mon coeur n’est pas incertain :
        De sa sincérité tu pourrais tout attendre.
        Et mon amour, vainqueur du Temps et du Destin,
        S’enlacerait à toi, plus ardent et plus tendre !

        Oui, si tous tes attraits te quittaient aujourd’hui,
        J’en gémirais pour toi ; mais en ce coeur fidèle
        Je trouverais peut-être une douceur nouvelle,
        Et, lorsque loin de toi les amants auraient fui,
        Chassant la jalousie en tourments si féconde,
        Une plus vive ardeur me viendrait animer.
        “Elle est donc à moi seul, dirais-je, puisqu’au monde
        Il ne reste que moi qui puisse encor l’aimer !”

        Mais qu’osé-je prévoir ? tandis que la jeunesse
        T’entoure d’un éclat, hélas ! bien passager,
        Tu ne peux te fier à toute la tendresse
        D’un coeur en qui le temps ne pourra rien changer.
        Tu le connaîtras mieux : s’accroissant d’âge en âge,
        L’amour constant ressemble à la fleur du soleil,
        Qui rend à son déclin, le soir, le même hommage
        Dont elle a, le matin, salué son réveil !

        #146196
        VictoriaVictoria
        Participant

          Dans les bois

          Au printemps l’oiseau naît et chante :
          N’avez-vous pas ouï sa voix ?…
          Elle est pure, simple et touchante,
          La voix de l’oiseau – dans les bois !

          L’été, l’oiseau cherche l’oiselle ;
          Il aime – et n’aime qu’une fois !
          Qu’il est doux, paisible et fidèle,
          Le nid de l’oiseau – dans les bois !

          Puis quand vient l’automne brumeuse,
          il se tait… avant les temps froids.
          Hélas ! qu’elle doit être heureuse
          La mort de l’oiseau – dans les bois !

          #146197
          VictoriaVictoria
          Participant

            Fantaisie

            Il est un air pour qui je donnerais
            Tout Rossini, tout Mozart et tout Weber,
            Un air très-vieux, languissant et funèbre,
            Qui pour moi seul a des charmes secrets.

            Or, chaque fois que je viens à l’entendre,
            De deux cents ans mon âme rajeunit :
            C’est sous Louis treize; et je crois voir s’étendre
            Un coteau vert, que le couchant jaunit,

            Puis un château de brique à coins de pierre,
            Aux vitraux teints de rougeâtres couleurs,
            Ceint de grands parcs, avec une rivière
            Baignant ses pieds, qui coule entre des fleurs ;

            Puis une dame, à sa haute fenêtre,
            Blonde aux yeux noirs, en ses habits anciens,
            Que dans une autre existence peut-être,
            J’ai déjà vue… et dont je me souviens !

            #142142
            VictoriaVictoria
            Participant
              #146198
              VictoriaVictoria
              Participant

                Une Allée du Luxembourg

                Elle a passé, la jeune fille
                Vive et preste comme un oiseau
                À la main une fleur qui brille,
                À la bouche un refrain nouveau.

                C’est peut-être la seule au monde
                Dont le coeur au mien répondrait,
                Qui venant dans ma nuit profonde
                D’un seul regard l’éclaircirait !

                Mais non, – ma jeunesse est finie …
                Adieu, doux rayon qui m’as lui, -
                Parfum, jeune fille, harmonie…
                Le bonheur passait, – il a fui !

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