Karl Marx en 1874

Le Capital (Livre 1, Section 3)

L1, S3, Chap. 7, partie I, La production de valeurs d’usage – Le Capital (avec notes)

L1, S3, Chap. 7, partie II, La production de la plus-value – Le Capital (avec notes)

L1, S3, Chap. 8, le capital constant et le capital variable – Le Capital (avec notes)

L1, S3, Chap. 9, partie I, le degré d’exploitation de la force de travail – Le Capital (avec notes)

L1, S3, Chap. 9, partie II, le produit – Le Capital (avec notes)

L1, S3, Chap. 10, partie I, limite de la journée de travail – Le Capital (avec notes)

L1, S3, Chap. 10, partie II, le capital affamé de surtravail – Le Capital (avec notes)

L1, S3, Chap. 10, partie III, la journée de travail non limitée par la loi – Le Capital (avec notes)

L1, S3, Chap. 10, partie IV, travail de jour, travail de nuit – Le Capital (avec notes)

L1, S3, Chap. 10, partie V, Lois coercitives pour la prolongation de la journée de travail – Le Capital (avec notes)

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Livre premier : Le Développement de la production capitaliste – Troisième Section : La Production de la plus-value absolue (traduction de J. Roy entièrement révisée par l’auteur, 1872).

On a vu dans la seconde section que le capitaliste, en achetant à l’ouvrier sa force de travail, même à son juste prix, compte lui faire produire plus de valeur qu’elle n’en vaut – une plus-value.

Mais comment cela se passe-t-il exactement ?

« L’homme aux écus a payé la valeur journalière de la force de travail ; son usage pendant le jour, le travail d’une journée entière lui appartient donc. Que l’entretien journalier de cette force ne coûte qu’une demi‑journée de travail, bien qu’elle puisse opérer ou travailler pendant la journée entière, c’est‑à‑dire que la valeur créée par son usage pendant un jour soit le double de sa propre valeur journalière, c’est là une chance particulièrement heureuse pour l’acheteur, mais qui ne lèse en rien le droit du vendeur.

Notre capitaliste a prévu le cas, et c’est ce qui le fait rire. L’ouvrier trouve donc dans l’atelier les moyens de production nécessaires pour une journée de travail non pas de six mais de douze heures. » (Chap 7 II)

« La période d’activité qui dépasse les bornes du travail nécessaire […] forme une plus-value […]. Je nomme cette partie de la journée de travail, temps extra et le travail dépensé en elle surtravail »(chap 9 1).

Combien d’heures dans une journée de travail – combien de “temps extra” ? Voilà donc la question décisive.

Mais avant d’observer au chapitre 10 comment elle s’est résolue historiquement, les chapitres 7 à 9 de cette troisième section détaillent minutieusement comment l’activité productive se combine avec la transformation de la matière première, des matières auxiliaires et avec l’usure des instruments de travail, dans le “procès de travail” d’une part, dans la création de valeur d’autre part.

Car le capitaliste a sa propre façon de présenter la chose. Par exemple, il fait rentrer l’avance des matières premières et des autres moyens de travail, dans le calcul du taux de plus-value (chap 9), ce qui le minimise énormément. Aussi peut-il crier à la ruine dès qu’il est question de limiter la journée de travail. (chap. 9 II, 10 et 11).

C’est ce qu’il fait, par exemple, face à la loi de 1833, qui, après des années de luttes ouvrières, osait interdire le travail de nuit et réduire à 12h la journée de travail… pour les enfants et adolescents de 13 à 18 ans.

Avant la naissance de la grande industrie, les fabricants avaient rêvé de faire passer la semaine de travail de « l’ouvrier manufacturier » de 4 à 6 jours et de porter, dans des « maisons de terreur » sa journée à 10 h. Mais de 1770 à 1830, devenus capitalistes, ils avaient réussi à élever le temps de travail journalier à… 18 heures, enfants et femmes compris.  (chap 10 V et VI).

« La création d’une journée de travail normale est […] le résultat d’une guerre civile longue, opiniâtre et plus ou moins dissimulée entre la classe capitaliste et la classe ouvrière. » (Chap. 10 VII)

C’est cette histoire de la « journée de travail » que racontent les 7 parties du chapitre 10, en commençant par l’Angleterre, berceau de l’industrie moderne  jusqu’à l’affirmation par les ouvriers américains, en 1866, de l’objectif de la journée de 8 heures, adopté peu après par l’Association internationale des travailleurs, dite « l’Internationale », à son congrès à Genève.

On y voit, rapports d’inspecteurs de fabrique à l’appui, les conditions de travail , tant dans les fabriques modernes, où l’exploitation capitaliste fait des ravages en premier et qui sont soumises en premier à une limitation de la journée de travail – ces limites sont alors contournées voire violemment combattues par les fabricants (manufactures de coton, laine, lin, soie, chap. 10 II et 10 VI), que dans celles “de vieilles roches” qui en sont d’abord “libres” (poteries, boulangeries – au mode de production “antique”, dentelleries, chemins de fer – jusqu’à 50 h de travail sans interruption, ateliers modistes – jusqu’à 30h sans interruption, forges, haut-fourneaux et laminoirs, où les enfants travaillent de nuit, blanchisseries “en plein air”), puis finalement “soumises” à leur tour .

Les qualificatifs qui émaillent ces descriptions ne sont alors pas tous de Marx :  “esclavage perpétuel” (Postlhewait), “esclaves blanc” (Morning star), “travailler à mort” (Dr Letheby), « Capital affamé de surtravail », « soif de vampire du capital pour le sang vivant du travail », « passion aveugle et démesurée [du capital], […] gloutonnerie de travail extra »…

« Bien loin que ce soit l’entretien normal de la force de travail qui serve de règle pour la limitation de la journée de travail, c’est au contraire la plus grande dépense possible par jour, si violente et si pénible qu’elle soit, qui règle la mesure du temps de répit de l’ouvrier. Le capital ne s’inquiète point de la durée de la force de travail. Ce qui l’intéresse uniquement, c’est le maximum qui peut en être dépensé dans une journée. Et il atteint son but en abrégeant la vie du travailleur, de même qu’un agriculteur avide obtient de son sol un plus fort rendement en épuisant sa fertilité. » (Chapitre 10 VI)

« L’industrie cotonnière date de 90 ans… En trois générations de la race anglaise, elle a dévoré neuf générations d’ouvriers. » (Chp. 10 V, discours de Ferrand à la Chambre des communes, du 27 avril 1863)

« Après moi le déluge ! Telle est la devise de tout capitaliste et de toute nation capitaliste. Le capital ne s’inquiète donc point de la santé et de la durée de la vie du travailleur, s’il n’y est pas contraint par la société. » (Chap. 10 V)

La version sans les notes dure 6 h 56.

Traduction : Joseph Roy (18?- 18?).

Consulter la version texte de ce livre audio.
Illustration :

Illustration : Karl Marx (Le Capital, édition française de 1872)

Licence d'utilisation : Réutilisation du livre audio soumise à autorisation préalable.
Livre audio gratuit ajouté le 07/09/2017.

23 Commentaires

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  1. Albatros,
    vous semblez ignorer la triste polemique provoquee par la lecture de Bainville sur ce site .
    Je ne vous en vous en blame pas ,je tenais simplement a le souligner .
    Quand a la condition du proletariat sous les regimes aristocratiques decadents d’hier , la ploutocratie actuelle ou les tentatives socialistes nationales ou internationales du xxem siecle ,le sujet est trop vaste, trop complexe et trop essentiel pour n’ etre pas traite sans une liberte d’information effective, c’est a dire sans censeur! Car comme vous le savez sans doute , quand la verite n’est pas libre la liberte n’est pas vraie .
    C’est la raison pour laquelle bien que je ne sois pas marxiste je vous felicite pour votre travail.

  2. De rien, Bainville 😉

    Ah bon, il y a, sur ce site, des “cris d’Orfraie” contre la “blancheur de lys” ?

    Je profite de votre passage sur cette page ce jour, pour évoquer l’émission “Envoyé spécial” qui est passée hier 26/09/2017 sur France2. Les enquêtes des journalistes sur les conditions de travail dans deux grandes enseignes ont montré deux situations y faisant complètement écho à la citation issue de cette section :

    “Bien loin que ce soit l’entretien normal de la force de travail qui serve de règle pour la limitation de la journée de travail, c’est au contraire la plus grande dépense possible par jour, si violente et si pénible qu’elle soit, qui règle la mesure du temps de répit de l’ouvrier.”

    Handicapées au bout de quelques années (à enchaîner, chaque jour plus de 6h d’affilée – sans pause : caisse en station debout et mise en rayon de cartons ou palettes), puis licenciée ; mal au dos après quelques mois (pour avoir porté autour de 8 tonnes de colis chaque jour, sans jamais avoir atteint le quota de colis demandé), puis licencié ; ou plutôt : “donc licencié”, tant il est évident qu’il n’est pas question que baisse la productivité. Ouvriers, cadres, tout le monde y passe.

    A écouter les directeurs, leur société n’est que “blancheur de lys” ; ces faits, de simple anomalies “inadmissibles”.

    Mais pour un coin du voile levé, par une petite poignée de journalistes, combien de situations analogues (déjà à l’époque de Marx, la société “cultivée” ne cherchait pas à connaître les conditions de travail décrites dans cette section du Capital) ?

    Or, un permis de surexploiter a été délivré le 22 septembre dernier…

    Dernière chose reliée à l’actualité – culturelle cette fois : “Le jeune Karl Marx”, c’est le titre d’un film de Raoul Peck qui sort aujourd’hui même.

    Vous pourrez bientôt vous reporter sur litterature audio.com sur l’évocation de cette période, telle qu’Engels nous la relate – du point de vue de la “révolution philosophique” qui s’y déroula, dans son “Ludwig Feuerbach et la fin de la philosophie classique allemande”.
    « Tout comme en France, au XVIIIè siècle, la révolution philosophique, au XIXè siècle, précéda également en Allemagne la révolution politique. » – celle, méconnue, de 1848 (qui embrasa aussi la France et toute l’Europe).

  3. Le choix d’un auteur aussi engage aurait pu nous faire craindre les cris d’orfraies de certains censeurs indignes ,mais non , visiblement le rouge a des privileges que la blancheur des lys n’a pas .
    Ceci dit merci pour cette lecture instructive et enrichissante .

  4. De toute façon cela n’altérait en rien l’écoute. Oui, ce texte est passionnant, à lire et à relire… Vraiment!

  5. Merci, Ceusette, pour la remarque.
    Cela devrait être corrigé très prochainement – j’ai envoyé les nouveaux fichiers.

    Bonne poursuite de lecture,

    Au chapitre 10, “la journée de travail”, nous quittons les abstractions pour rentrer dans l’histoire concrète. Cela peut se lire de manière indépendante.

    Sauf que, évidemment, le propos de Marx est de montrer que cette histoire est indissolublement liée au capitalisme ; que le “comment” (sont exploités les travailleurs) est indissociable du “pourquoi” (sont exploités les travailleurs).

    On fait comme on veut.

    Bien cordialement,

    Albatros

  6. J’ai juste une remarque d’ordre technique. Dans la “version avec les notes”, certains fichiers commencent par annoncer qu’il s’agit de la “version sans les notes”. En fait, cela ne pose pas de problème puisqu’il y a effectivement les notes! Je le signale juste pour les lectrices et lecteurs qui pourraient être dérouté(e)s. Sinon, c’est une très bonne idée de proposer deux versions (et ce d’autant que cela a représenté un travail supplémentaire). Sinon, je remercie la lectrice pour ses propres notes supplémentaires qui apportent des éclairages utiles au texte (ce qui est encore plus précieux pour les lecteurs malvoyants)

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