James Abbott McNeill Whistler : Harmonie en Rose et Gris : Lady Meux

Sans nom

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Nul doute que Wilkie Collins n’ait donné avec Sans nom l’un de ses plus intraitables chefs-d’œuvre : celui en tout cas qui privera le mieux de sommeil le lecteur assez téméraire pour s’y plonger, pour s’y perdre. De tous ses romans, celui que préférait Dickens… C’est aussi le plus noir : portrait et itinéraire d’une femme dépossédée de toutes ses espérances (et même de son identité) à la suite d’un complot fomenté par des gens du meilleur monde. Elle se battra, se salira les mains, fera le terrible apprentissage de la liberté… et nous tiendra en haleine huit cents pages durant au fil d’une intrigue qui ne nous épargne rien. Prétexte, pour l’auteur, à décorseter la bonne société victorienne avec un sadisme tout hitchcockien.

Extrait :
« Existe-t-il donc, dans tout être humain, au-dessous de ce caractère extérieur et visible, empreint et façonné par les influences sociales qui nous entourent, une disposition intérieure, invisible, qui fait partie intégrante de nous-mêmes, que l’éducation peut modifier indirectement, mais qu’il faut désespérer de changer ? La philosophie qui conteste ceci et nous déclare nés avec des dispositions semblables à des feuillets de papier blanc, n’est-elle pas la même qui méconnaît la différence irrémédiable de nos visages, et qui, n’ayant jamais comparé deux enfants nouveau-nés, ignore à quel point échappent déjà, par d’irrésistibles instincts, à la volonté de leurs mères ou de leurs nourrices ? Existe-t-il, variant à l’infini selon chaque individu, des forces innées qui nous poussent, tous tant que nous sommes, vers le Bien ou vers le Mal ? forces cachées à des profondeurs où ne sauraient atteindre ni les encouragements purement humains, ni la contrainte humaine, Bien caché, Mal caché, tous deux également à la merci de l’occasion qui les libère, de la tentation qui les provoque ? De leur étroit cachot, le hasard des circonstances garde-t-il toujours la clef ? Et n’est-il pas ici bas de surveillance attentive qui nous puisse révéler à temps l’existence de ces forces prisonnières en nous-mêmes, et auxquelles cette clef peut donner issue ? »

Traduction : Paul-Emile Daurand-Forgues (1813-1883).

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Livre audio gratuit ajouté le 01/05/2017.

51 Commentaires

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  1. J’ai lu votre billet et je me suis demandée si vous preniez du plaisir à lire. Quelle rigueur! c’est intéressant de connaître le travail en amont… On se rend mieux compte de l’investissement des donneurs de voix.

    Je vous remercie pour votre réponse. Voyez-vous quand vous parlez de baroque hitchcokien, je pense immédiatement à la noirceur et au romantisme des ouvrages de Daphné Du Maurier… En ce moment, je lis Via mala, et j’y retrouve cet univers teinté de soufre.
    Mais à lire les critiques de ce roman, je me rends bien compte qu’il a rendu insomniaque de nombreux individus;)

  2. Votre ressenti est pertinent, emilieemilie.
    Pour ma part, en m’y plongeant de manière quasi-autiste (j’ai le “retour son” dans le casque – voir mon billet “ma méthode d’enregistrement” sur le forum technique), j’accepte le texte, chaque mot, dans son intégralité, et devient par conséquent neutre dans l’appréciation que je pourrais avoir autrement, avec de la distance. L’impression générale qui m’est restée par la suite, c’est quelque chose comme du baroque hitchcokien…

  3. Merci Daniel pour cette lecture! Il me semble que c’est la première fois que je passe du temps en votre compagnie. Et quel temps! 40 heures! Je ne peux que vous féliciter pour la performance. Un vrai régal…

    Quant au livre, mes sentiments sont un peu mitigés. Autant j’ai apprécié la partie avec le capitaine (je revois encore le tableau du quatuor et la complicité entre Magdeleine et son faux oncle), autant le reste m’a un peu ennuyée…

    Par sensibilité personnelle, je n’ai eu aucun atome crochu avec l’héroïne, et j’ai trouvé le roman un brin moralisateur. Mais je reste fidèle à Wilkie Collins, et je vais écouter prochainement “le secret” notamment pour la beauté de l’écriture…

  4. Je découvre à l’instant votre lecture de “Sans nom”.
    Je ne m’attendais pas à ce que cela soit si rapide.
    Je m’en délecte à l’avance. Merci infiniment.
    Marie

  5. Bonjour, effectivement, je ne parviens pas non plus à télécharger le chapitre 1 ce soir. Je vais prendre mon mal en patience en attendant de pouvoir savourer cette prometteuse lecture ! Merci à tous deux.

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